L'acomplissement d'une vengeance (et l'entrainement d'une blonde...)

Dès le matin de son arrivée, le japonais exigea une audience. Il prit juste la peine de confier les clés et l'adresse de l'appartement qu'il avait loué à Billy (qui n’eut d’ailleurs pas vraiment le temps d’émerger du sommeil avant qu’il se soit éloigné). On le prit tout d'abord pour un fou, mais face à son insistance on le pria de décliner son identité. L'évocation seule des Imawari, famille au nom funeste trop reconnu, lui accorda une entrevue en à peine quelques heures, mais seulement avec la reine. Par chance, le premier ministre portait justement d'un entretien avec elle, et sa curiosité le poussa à rester pour entendre ce qu'avait à dire Yukisuke.
Il se présenta en quelques mots. Elizabeth III le questionna sur la raison de sa venue.
- Vous n'ignorez pas l'implication de ma lignée dans le conflit maintenant plus qu'imminent qui se prépare, commença-t-il alors, en se tournant vers le ministre, véritable détenteur des pouvoirs politique et militaire du Royaume Uni. Je suis en ces lieux pour vous prévenir dès aujourd'hui de la menace qu'ils représentent. J'ai déserté le dirigeable des Imawari dans cet unique but. Comme vous le savez, ils sont alliés à l'Allemagne et l'Italie en tant que membre indépendant du corps armé nippon. C'est en tout cas ce qu'ils prétendent officiellement.
« La réalité est bien plus complexe. Ils deviennent actuellement les plans et le prototype d'un laser, dont la puissance et la précision de tir est capable de perforer le ballon d'un pays à des centaines de kilomètres, puisqu'il est également soumis à l'attraction terrestre, et agit donc comme un satellite sur une certaine distance.
« Ils comptent tester leur invention sur la France, qui est petite et faible, pour montrer leur force aux yeux du monde. Ils en ont offert un aux allemands et aux japonais sous couvert de leur alliance mais mènent en fait un double jeu. Ils cherchent à monter ces deux nations contre elles, et après avoir annexé à eux trois le reste du globe, ils laisseraient les deux puissances s'affronter et s'affaiblir, avant de les menacer de faire exploser les bombes qu'il auront alors dissimulé dans les lasers pour faire pression sur eux et devenir grâce à cela seuls maitres du monde.
Le ministre avait pâli un peu plus à mesure que Yukisuke avançait dans son récit, et étrangement ce fut Elizabeth qui réagit la première.
- Quel... rôle joue l'Italie dans leur plan ? articula-t-elle, l'air grave.
- Aucun. Ils n'ont que faire de ce pays.
- Ce que vous venez de nous... dévoiler peut se révéler d'une importance capitale, et même cruciale si l'avenir de la France en découle. Mais comprenez que nous avons... du mal à vous croire, compte tenu de votre... jeune âge, et vos origines, justement, ne vous en offensez pas. Si vous aviez des preuves de ce que vous avancez...
- J'en ai, répliqua abruptement l'adolescent.
Il détacha le Don de sa ceinture, et dégaina la lame, ce qui eu pour conséquence une vive réaction de la part des gardes royaux, qui firent de même. Il les ignora et retourna le fourreau à la verticale. Un minuscule disque métallique tomba au creux de sa paume. Il rengaina son arme et tendit sans cérémonie la puce électronique. Le ministre vint la lui prendre en personne, et l'inséra dans un ordinateur. Aussitôt, le plan d'une machine incroyablement précis se déroula en trois dimensions.
- Il s’agit des plans de l’arme dont je vous ai parlé. Se trouvent aussi dans ces données comment les détruire et les rendre inoffensives. J'ai joint également deux courriers secrets de ma famille à l'Allemagne et au Japon.
- Comment avez-vous obtenu ces informations ? souffla le ministre, qui avait en partie reprit contenance.
- Je suis héritier légitime du chef à la tête du dirigeable actuel. En cette qualité, j'ai accès à presque toutes les données que je souhaite consulter.
Un court silence accueilli sa déclaration.
- Est-ce tout ce dont vous souhaitiez nous entretenir ? demanda finalement la reine.
- A vrai dire non. Il y a encore une chose. Je suis un hors-la-loi en Allemagne pour le meurtre de mon grand-père, et recherché activement par ceux de mon sang en raison de ma trahison. Je demande donc à l'Angleterre d'accepter de m'accorder l'asile politique.

Yukisuke entra dans sa chambre. Billy avait déposé sa valise près de son lit. Il se dit qu'il ferait la remercier plus tard. Il ne vit aucune trace de la jeune fille, mais ne doutait pas qu'elle était restée un moment, puisque la poubelle était pleine d'épluchures de fruits - elle avait visiblement trouvé leur emplacement dans la poche grâce au message ''ne pas ouvrir'' qu'il avait laissé à son attention.
Le premier ministre, conscient de l'enjeu des informations fournies par l'adolescent, et de la possibilité que ce réfugié politique en détienne d'autres, avait aussitôt prononcé son verdict quant à la demandé d'asile de cet allié inespéré. De plus, cela permettait de le surveiller plus facilement.
- Il vous est accordé, évidemment, avait-il répondu. Nous vous transmettrons les papiers administratifs nécessaires dans les plus brefs délais.
Soudain, Yukisuke se souvint qu'il avait une dernière requête à soumettre au gouvernement anglais.. Il s'était dis que, pour qu'il ne se retrouve pas enlisé dans une affaire douteuse à cause d'elle, il fallait demander pour Billy des papiers d'identité. Il se promis de le faire à l'occasion, en échange des plans du dirigeable des Imawari, pourquoi pas.
Il sortit de ses appartements, n'ayant pas envie de défaire ses valises dans l'immédiat. Au premier croisement, quelqu'un le percuta. Il s'apprêtait à lancer une remarque acerbe à son agresseur quand il reconnu l'allemande blonde porteuse de tap... cape.
- Fais attention... maugréa-t-il de mauvaise foi - en réalité c'est bel et bien lui qui pensait à autre chose (du moins il ne savait pas si c'était aussi le cas de Billy).
- Désolée, j'ai faim, répondit-elle comme s'il s'agissait d'une évidence. Toi aussi, ton ventre gargouille (cela faisait plus de douze heures qu'il n'avait pas mangé - elle ne lui avait pas laissé le moindre fruit...) C'est pas sérieux, Yuki !! Viens manger !
- Ne m'appelle pas Yuki ! s'exclama le japonais, soudainement brusque.
- Mais si c'est mignon Yuki, soutint la jeune fille en sous-entendant silencieusement que c'était plus pratique aussi.
- Absolument PAS.
- Mais si, ça te vas comme un gant ! poursuivit Billy, tout sourire, et pinça les joues de son cadet.
- GGHH ?? Arrête ça tout de suite ! ordonna-t-il en articulant à moitié. Elle le lâcha, mais affichant toujours la figure d'un enfant dans un magasin de jouet. Tu veux te battre ? la défia-t-il, en colère.
- Nein ! Ich vole essen ! (Hontonii gomenasai, watashi wa doitsu-go o hanasanai = I apologize, I don't speak german...)
Sans plus de paroles, Billy s'éloigna. Yukisuke, interloqué, la suivit sans vraiment comprendre (l'allemand n'a jamais été son truc). Quoique il avait une idée d'où cet estomac sur cape se dirigeait...